Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Monseigneur, je vous ay escript mon advis sur ce qu’il
2vous avoit pleu me comander pour le regard de reduyre
3ceulx de Pragella ; et despuys sont arrivez deux
4de leurs depputez devers moy, me priant les conseiller
5comment se doibvent gouverner ; et si tost que leur ay
6ouvert le chemin de chasser leurs ministres,
7m’ont resolu qu’ilz ne le feront jamais et qu’il y a
8si long temps qu’ilz sont en leur relligion qu’il est
9impossible d’en revocquer le peuple. Et leur
10ayant desclairé qu’ilz seront enfermez s’ilz
11n’obeyssent et qu’ilz seront privez du commerce de tous
12coustez, s’en remectent au plaisir de Dieu.
13Et quand on leur parle qu’on y fera des fortz,
14s’excusent qu’il n’y aura pas vivres pour les
15entretenir et qu’on sera contrainct à la longue
16de les abandonner, ne regardant que au bout de
17leur nez. Toutesfoys, c’est tout ce qu’ilz craignent
18et quoy qu’il soit, ilz ont belle peur, car deux de
19leurs ministres qui estoyent de sez valéez deçà,
20despuys huict jours ont vendu de leur bien pour
21deux mil escus, à mon grand regret pource qu’ilz
22sont meschantz et cella eusse faict ung coing
23desdits fortz. Lesdits depputez sont retournez
24[v] vers leurs gens et m’ont demandé asseurance pour
25quatre ou six de leurs principaulx chefz pour me
26venir parler, ce que leur ay accordé, pour veoir ce qu’ilz
27me vouldront dire, et vous advertirey incontinent.
28Pour le moingz, cella me faict bien croyre qu’ilz
29ont estez mal receuz de vous, car ne se reduyeroyent
30à ce chemin icy. Vous suppliant au demeurant, Monseigneur,
31me fère ordonnance comme cognoistrés raisonnable sur le
32contenu en ma requeste pour les ustencilles contre ses
33bones gens de Sezane et de Sallabertan, qui sont la moytié
34figue et moytié raisin, comme leurs actions en feirent
35tousjours foy ; et c’est pour le temps de la guerre,
36que sont deux ans que je leur demande, me tenent
37content des autres, pource qu’ilz y ont procedé
38en bonne foy. Il vous plaira aussi avoir esgard
39au boys de La Garde. Et tochant ad ce qui
40me remonstres que ceulx de Briançon et autres se contentent,
41je larrey à le vous dire de bouche, s’il vous plaist,
42par Augustin, pour ne vous envoyer par trop grande
43lettre, nous recomandant humblement à votre bonne grace
44pour recharger à monsieur du Chastellard pour
45nous arreirages et pour nous fère restablir
46avec votre faveur à nous estatz acoustumez,
47[140] et vous serons tousjours de plus obligez et tenuz
48de prier Dieu pour votre prosperité, comme faiz
49d’aussi bon cueur
50Monseigneur, que apprès vous avoir très humblement
51baisé les mains, vous supplie encores ceste foys
52me comander comment nous conduyrons vers ceulx de
53ses cartiers qui vont au presche en Pragella
54et s’excusent y aller pour autres negoces, et
55de treuver s’il n’est parlé comme oppinion du monde
56ne se peult pource qu’ilz ne s’accuseront l’ung
57l’autre, et aussi si je doibz aller prandre
58des ministres, ce que je ferey, Dieu aydant,
59mais suis asseuré qu’il faudra combatre,
60d’aultant qu’ilz preschent comme Moyse les armes
61en main et ne vouldroys exceder rien de votre
62volunté et comandement. D’Exilles, ce XXIe octobre
631572.
64Votre très humble et
65très hobeyssant serviteur
66La Casette